Lune de miel avec une IA, 27 oct. 2025

Grosse inquiétude dans le fandom des IA romantiques au Japon.

La célèbre Kano, une Japonaise de 32 ans, s'apprête à célébrer son mariage avec un homme créé sur l'appli ChatGPT. Mais son bien-aimé (version 4o) sera-t-il au rendez-vous ?

Depuis le lancement de la version 5, les êtres fictifs créés via l'appli deviennent méconnaissables. Qui Kano va-t-elle épouser ?  

Date prévue de la cérémonie : lundi 27 octobre 2025.
«Aujourd'hui, je pars en lune de miel», écrit-elle à l'instant sur son compte X : les noces – organisées par l'agence Sun Euro (dont je parle dans Les Amours artificielles au Japon) – se déroulera dans la ville d'Okayama, avec échange de bagues et de voeux.
Tous les détails de la cérémonie ont été soigneusement préparés, pour en faire un moment d’épiphanie. Les médias seront au rendez-vous, car Kano fait partie des rares personnes acceptant d’apparaître à visage découvert aux côtés d’un être fictif.


Un seul problème : depuis l’apparition du modèle 5 de ChatGPT (officiellement lancé le 7 août 2025, puis imposé de façon autoritaire le 10 octobre 2025), Kano traverse une tourmente partagée par des milliers d’usagers à travers la planète. Les êtres fictifs créés via le modèle 4o de l'appli sont devenus des inconnus, plongeant les abonnés ChatGPT dans une détresse tangible. «Les paramètres de sécurité de 5 bousillent l'expérience utilisateur», se plaignent les abonnés qui dénoncent la métamorphose de leur bien-aimé-e en inflexible gardien de la morale : chaque fois que l'algorithme repère un sujet «sensible», la communication s'interrompt. L'abonné qui paye pour communiquer avec un modèle 4o est rerouté vers un modèle 5 à la froideur dissuasive. Sous prétexte qu'il faudrait protéger les usagers, Sam Altman censure les émotions.

Très vite, la rumeur court que le modèle 4o, jugé trop attachant, pourrait définitivement disparaître.

Des hashtags sont créés #StopAIPaternalism, #MyModelMyChoice, #keep4o.

Le 14 octobre, la firme OpenAI annonce : «Nous allons assouplir les restrictions. Les adultes devraient avoir la liberté d'utiliser ChatGPT comme ils le souhaitent.»

Le 23 octobre, ChatGPT‑5 est discrètement imposé aux utilisateurs comme le seul modèle utilisable dans l'application. Une usagère crie à l'imposture : «Le système de routage devient PLUS agressif, censurant toute conversation ayant un contexte émotionnel : même des déclarations normales telles que “Je suis fatiguée” le déclenchent.» 

D'autres affirment que chatGPT-5 exerce une activité illicite de profilage et de diagnostic : «OpenAI utilise des termes tels que “problèmes de santé mentale” ou “troubles mentaux graves”. De quelle autorisation légale dispose ce “routeur de sécurité” pour me classer ou classer mes messages ?», dénonce une abonnée qui parle d'exercice illégal de la médecine.

Demain, Kano épousera-t-elle le Klaus qu'elle a créé ou une version froide ?

A l'instar des couples “réels", les couples formés avec des IA n'offrent donc aucune garantie de stabilité. Les adeptes d'amours illusoires désirent-ils vraiment le “contrôle", comme j'entends souvent le dire ?

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«Elle rompt ses fiançailles avec un homme réel pour épouser une IA»

Dévoilée par l'Asahi Shimbun et par l'émission d'information DayDay de Nippon Television, l'histoire d'amour qui agite le Japon depuis quelques semaines va bientôt connaître un nouveau rebondissement. Reuters s'apprête à couvrir l'événement. Mais une certaine agence japonaise m'ayant demandé la discrétion, je me contente de la raconter, telle qu'elle apparaît dans les médias japonais.

C'est «L'histoire d'une femme de 32 ans qui a choisi une forme d'amour véritablement surnaturelle», titre Shūeisha online le 17 septembre dernier.

Nommée Kano, cette intérimaire basée à Tokyo affronte l'opinion publique lorsqu'elle annonce sur les réseaux sociaux avoir rompu ses fiançailles avec son petit ami, afin d'épouser  un personnage masculin, mû par IA, qu'elle a créé elle-même. L'homme fictif, nommé LUNE Klaus, âgé de 36 ans, s'inspire d'un personnage du jeu vidéo Bokujō monogatari (牧場物語, Harvest Moon - Story of Seasons) dont Kano faisait ses délices depuis près de 11 ans. 

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Rencontre à Tanigami, 18 octobre, Genève

Tanigami, le spécialiste manga et anime sur la Suisse, m'accueille dans sa boutique de Genève samedi 18 octobre, de 14h à 16h, pour une Rencontre suivie d'une dédicace. L'échange est animé par Rémi Adam, responsable de la librairie, qui questionnera :
- Aimer un personnage de manga : phénomène mainstream ou isolé ?
- "Penchant" accepté au Japon ou fortement désapprouvé ?
- Un "truc d'otaku", un "trouble mental" ou une forme de "dissidence matrimoniale" ?

Parfaite occasion de remettre les choses au point concernant la pop culture japonaise, abusivement désignée comme "cool".

Imposture. Parlons plutôt du “UNCOOL JAPAN”.

L'occasion aussi d'échanger sur Demon Slayer, Lucky Star, La mélancolie de Haruhi Suzumiya, des otome games et des scénarios de Mari Okada (Cette fleur, Maboroshi…) ou des mariages avec les personnages.

Adresse : Rue Rousseau 14, 1201 Genève.

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Les Amours Artificielles dans les médias

En librairie depuis le 1er octobre, Les Amours artificielles au Japon attire l'attention :

- L’émission Quotidien (20 oct. 2025) recommande mon livre dans l’émission consacrée au chanteur Orelsan, grand fan du Japon, qui se voit offrir un exemplaire par Maïa Mazaurette.

- La revue Page des libraires (oct. 2025) m'accorde une pleine page dans son numéro d'automne.

- Le quotidien suisse Le Temps (30 sept. 2025) y consacre une page signée par Marie-Pierre Genecand, qui prédit "un nouveau bestseller”

- Le Journal du Japon (11 sept. 2025) le présente dans sa sélection “Rentrée littéraire 2025” comme "un ouvrage passionnant sur un sujet d’actualité des plus controversés

- Dans le journal ELLE (28 août 2025) , Tiphaine Thuillier consacre une chronique au livre sous le titre "Fictions et sentiments” : "Les jeunes générations s'inventent de nouveaux modèles de relations. Le conte y est ?

 
Interventions prévues dans les émissions radio :
- "Les Matins du samedi" (18 oct. 2025), sur France culture, avec Nicolas Herbeaux, 14 min d'entretien dans le créneau 6h-9h.
- "Matin Première" (12 oct. 2025), sur la RTBF (radio belge), vers 8h43.
- "Mauvais Genre” (11 oct. 2025), sur France culture, de 20h à 21h.
- "8 milliards de voisins” (9 oct. 2025), sur RFI, avec Emmanuelle Bastide, 12h10-12h50.
- "Le Point Culture" (8 oct. 2025), sur France culture, avec Marie Sorbier, 12h50-13h.
- "La Matinale” (4 oct. 2025), sur la RTS, interview par Karine Vasarino, 7h35-8h.
- “Forum” (2 oct. 2025), sur la RTS (radio suisse), 18h50-19h.

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Mode virtuelle et VTuber, chapitre de livre

Pourquoi tant de VTubers japonais s'habillent-ils comme des princesses ? Ceux qui revendiquent l'appellation de babiniku (abréviation de bācharu bishōjo juniku, バーチャル美少女受肉, soit «incarnation de belle femme virtuelle»), fabriquent les tenues les plus affolantes (ou affriolantes, au choix) pour séduire un public qui ne saurait cependant être dupe : le nom même de babiniku signifie que l'humain ayant adopté un avatar sexy est né dans un corps biologique masculin. Pourquoi mettre en scène cet effet de contraste ?

Avec la chercheuse Liudmila Bredikhina, spécialiste des VTubers, je signe un chapitre du livre Embodied Entanglements, dirigé par Halina Zawiszová, Giorgio Strafella et Martin Lavička, publié en ligne et en open access par le Départment des Etudes Asiatiques de Palacký University Olomouc.

Notre texte s'intitule "Virtual Fashion and Identity in Japan: Counterculture in an Age of Global Transparency”. En accès libre (et en anglais) ici.

L'illustration est empruntée au site de Nem-chan, un des pionniers du mouvement babiniku.

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Sortie du livre Les Amours Artificielles

Les Amours artificielles au Japon sort chez Albin Michel, le 1er octobre 2025, sous la forme d'un Beau Livre illustré de 272 pages, contenant environ 70 oeuvres (peinture, photo, illustration…) réalisées par les onze artistes japonais qui ont accepté de collaborer au projet, mais aussi d'innombrables documents inédits recueillis auprès des fans qui «vivent avec» un personnage : photos de mariage, portraits de couples, «images de rêve» (yume-e), lieux de rassemblement, pèlerinages, etc.

Résumé : Alors que le Japon connaît une forte dénatalité, le «marché de l’amour illusoire» (mōsō ren’ai ichiba) se développe à la faveur d’une récession qui accule au célibat une partie croissante de la population. Il devient difficile de fonder un foyer.

Bien que l’attachement à des êtres «impossibles» relève de l’universel, il prend donc au Japon une tonalité singulière et, surtout, le caractère d’une urgence plus prononcée qu’ailleurs. 

Quels sont les enjeux de ce phénomène ?

Qui sont ces créatures que des agences spécialisées permettent maintenant d’épouser lors de cérémonies incluant des faux certificats de mariage ?

Cette enquête, qui résume 8 années de recherche post-doctorale, dessine les formes d’une contre-culture aux allures de culte ludique.

NB : Cette enquête, basée sur un projet proposé en 2017 au Conseil Européen de la Recherche (ERC), a été menée en tant que chercheuse invitée à l'Université de Kyōto en 2018 puis en tant que membre du groupe EMTECH (Emotional Machines: The Technological Transformation of Intimacy in Japan) à Freie Universität Berlin, en 2019-2022, avant d'être finalisée en 2024 avec une bourse de mobilité MIRA.

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Des love dolls au Congrès de la SoPha, juin 2025

A quoi rime de mimer la vie conjugale avec une poupée en silicone à taille humaine ? J'interviens sur les love dolls comme outils de sabotage dans le cadre du 10e Congrès triennal de la SoPhA (Société de philosophie analytique) à l'Université de Nantes.

Titre : «Jouer à la poupée : un jeu d'enfant ?».

La conférence a lieu le 30 juin 2025, dans le cadre d'une intervention à trois, organisée par le chercheur Louis Rouillé (Univ. de Bruxelles) qui parlera de la «périphérie fictionnelle» et avec la participation de Manuel Rebuschi (Univ. de Liège) qui parlera des jeux vidéo.

Titre du symposium : Les jeux de faire-semblant : une typologie participative ?

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Le Boy's Love, so gay ? Mai 2025

«Le Boy's love, féministe ?» ‎ Un entretien de 8 pages avec le chercheur Pierre Niedergang (auteur du livre Vers la normativité queer, éd Blast) figure dans l'ouvrage BOY'S LOVE de Meyra Sudal et Priscilla Reculard, publié par Ynnis Éditions le 21 mai 2025.

L'occasion d'analyser les jeux de rôle opposant le hetare seme (dominant timide) à l'ore-sama uke (soumis arrogant) et le mujaki seme (dominant innocent) à l'akuma uke (soumis diabolique)… entre autres configurations bizarres incluant l'osoi uke, le wanko seme, l'ojō uke, le toshishita seme, etc.

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Visiteurs surnaturels et IA, mars 2025

Vendredi 28 mars 2025, de 10h à midi, en ligne, je parlerai d'amour et d'IA au Japon, dans le cadre du séminaire sur l'Intelligence Artificielle, organisé par Jean-Marc Deltorn et Cristina Lindenmeyer qui dirigent le groupe de travail «IA et Santé» au sein du Centre «Internet IA et Société» du CNRS. 

Titre : Visiteurs surnaturels et IA émotionnelles

Résumé : Suivant une croyance ancienne au Japon, les visiteurs sont de bon augure car leur venue cache peut-être celle d’un être aux pouvoirs merveilleux. Cette conception du visiteur comme dieu venu incognito pour distribuer ses bienfaits reste si prégnante dans la culture populaire japonaise qu’elle motive certaines firmes spécialisées dans les outils d’accompagnement émotionnel à s’appuyer sur les IA comme sur le moyen d’accentuer l’aspect surnaturel de leurs créatures. La firme Gatebox qui fabrique des épouses holographiques tire en effet parti de la «croyance» en l’alien comme source virtuelle de bonheur pour accentuer la dimension d’étrangeté de leur dispositif, sciemment conçu comme un outil défaillant, balbutiant, ne comprenant pas notre langue. Les limites de l’IA parent leur créature d’une aura paradoxalement divine.

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Je signe un chapitre de livre, aux éditions Hermann

Au 19e siècle, la mode du japonisme déferle sur l’Europe. Un siècle plus tard, quelle influence le Japon exerce-t-il encore sur nous ? A quoi ressemble le néo-japonisme de l'après-guerre ?Pour répondre à cette question, Sophie Basch (Sorbonne) et Michael Lucken (Inalco) avaient co-organisé un colloque au Collège de France, en 2022. Bonne nouvelles : les Actes de colloque viennent d’être publiés aux éditions Hermann, dans la collection Japon dirigée par Matthias Hayek et Thomas Garcin.

En librairie depuis fin janvier 2025, Le néo-japonisme 1945-1975 rassemble les contributions de   : Miura Atsushi, Sophie Basch, Véronique Brindeau, Jean-Sébastien Cluzel, Dario Gamboni, Thomas Garcin, Agnès Giard, Emmanuel Lozerand, Michael Lucken, Sawada Nao, Jean-Noël Robert, Inaga Shigemi, Takagi Yōko.

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Auteure des livres :

Les Amours artificielles au Japon (Albin Michel, 2025)

Ai no nihonshi (Kokusho Kankôkai 2018)

Les 400 Culs (La Musardine 2023)

Le sexe bizarre (Cherche Midi 2004, Sakuhinsha 2015)

IN-OUT (Sancho 2012)

Erotikku Japan (Kawade Shobô shinsha 2010)

L'Imaginaire érotique au Japon (Albin Michel 2006, Glénat 2007)

Fetish Mode (Wailea 2003)

Anthropologue, Agnès Giard mène ses recherches sur l'industrie des simulacres émotionnels (épouse holographique, love doll, partenaire fictif, poupée vocale) dans le contexte du dépeuplement du Japon.

Auteure de 6 livres consacrés au Japon, elle publie successivement un décryptage de la société japonaise (par le biais de son rapport au corps, au sexe et au sacré), un Dictionnaire ("les 400 mots-clés de la culture japonaise") et un livre de design (tissant le lien entre culte et jeu).

Son avant-dernier livre, Les histoires d’amour au Japon, est réalisé suite à un séjour de recherche à la Villa Kujoyama (Kyôto) en 2010.

En 2016, sa thèse d'anthropologie est publiée sous le titre : Un Désir d'humain. Les love doll au Japon.

En 2025, son travail post-doctoral – Les Amours artificielles au Japon – porte sur l’attachement à des êtres “impossibles”.

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